330 GT Registry

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AVANTAGES... ET INCONVENIENTS

VOITURES DE COLLECTION
L'ARGENT, ÇA BLOQUE LES MENINGES !

Texte: Philippe Jessier

Au même titre que la peinture, la sculpture ou le mobilier, l’automobile est devenue une forme d’art à part entière. Avec ses vendeurs, candides ou informés, ses acheteurs, puissants ou laborieux et toute une gamme d’intermédiaires plus ou moins compétents, faisant de la « voiture » comme on fait n’importe quoi. Et disant, la plupart du temps n’importe quoi...
Considérables, sidérants, de moins en moins raisonnables, les prix ne sont pas toujours les bons. Les voitures vendues ne le sont pas toujours les bonnes, non plus. Tout cela est finalement très compliqué...


FERRARI 330 GT 2+2
779 000 F (Coys, Londres, septembre 1989)
610 000 F (Coys, Londres, septembre 1989)
775 000 F (Versailles, octobre 1989)

Ce qu’il est convenu d’appeler «la folie des ventes aux enchères » débute approximativement en 1984. Jusque-là, des prix élevés étaient pratiqués pour certaines voitures d’exception mais le milieu était fermé, hermétique, réservé aux rares collectionneurs. Des gens riches mais avant tout des passionnés, achetant pour conserver, non pour spéculer. Spécifiquement, le marché existait mais il n’était encombré que de gens compétents. Propriétaires, acheteurs et experts faisaient bon ménage. Les commissaires-priseurs n’étaient pas encore de la fête. Certes, il y avait bien, ici ou là dans le monde, quelques belles ventes mais leur caractère rarissime autorisait qu’on parle d’elles comme de « véritables évènements ».
Aujourd’hui, les choses ont bien changé. De mentalité et de place. Chaque mois voit sortir de terre, une, deux ou trois ventes publiques. Certaines intéressantes, d’autres franchement nulles à la limite de l’escroquerie. Partant du simple principe que tout peut se vendre, tout est vendu, et la résultante est parfois étonnante. N’a-t-on pas vu, récemment, figurer au catalogue de la vacation du Palais des Congrès, le 8 décembre dernier, une Talbot Samba Rallye Gr.B cohabiter avec des Ferrari, Maserati et Lamborghini... C’est l’entrée, presque simultanée de Christie’s et Sotheby’s sur le marché de la voiture ancienne, qui va marquer le départ de la course. Une course d’où les acheteurs français sont presque systématiquement absents, supplantés par les américains, les anglais et les japonais. L’argent rend fou, c’est bien connu. Dés 1986, il apparut évident qu’il était possible de gagner de l’argent, beaucoup d’argent en touchant au commerce de la voiture ancienne. Déjà, parallèlement aux institutions officielles, études ayant toutes « réputation solide et références conséquentes », on vit, d’abord timidement, se créer de véritables sociétés achetant et revendant pour leur propre compte. C’est aujourd’hui le cas d’Orion à Monaco et de Coys en Grande Bretagne. Le principe est étrange mais totalement légal. Et dans ces deux cas précis, il s’accompagne de la garantie d’experts internationaux (... il sont rares), dont la fiabilité « technique et historique » n’a, pour l’instant, jamais été prise en défaut.
Dans le monde de la finance ou de l’immobilier, le principe inflationniste est cerné et digéré depuis longtemps. En matière d’automobiles anciennes, on se pose encore pas mal de questions. Certains modèles grimpent, d’autres s’envolent. D’autres encore se satellisent sans que l’on sache exactement pourquoi. Les exemples ne manquent pas. Tous sont plus significatifs les uns que les autres. Quatre ans, ce n’est rien. Cela passe vite. Il y a quatre ans, au mois de mai, lors d’une petite vente sans importance au parc de Saint-Cloud, un cabriolet Ferrari 250 GT Pininfarina de 1960, superbement restauré, fut adjugé 460.000 F.
Aujourd’hui, chez Christie’s, Sotheby’s ou Coys, cette voiture vaut au bas mot entre 3,8 et 4,2 millions de francs! De quoi oublier les convenances et les politesses. Au-delà d’une certaine somme, gagnée dans un certain laps de temps, il y a blocage des méninges, ankylose du raisonnement. Médicalement, c’est constaté et officiellement contrôlé. Dans le cas précis de Ferrari, il est évident que la mort du Commendatore est un début d’explication. La cote s’est littéralement envolée trois mois avant sa disparition, lorsque le vieil homme commençait à ne plus recevoir de visites, à annuler tous ses entretiens. On le savait malade mais l’annonce d’un décès prochain déclencha un vent spéculatif sont le caractère sordide n’échappera à personne. Discrètement, en dehors des ventes publiques, des Ferrari changèrent de mains.
Aujourd’hui, on commence à peine à comprendre. Certains ont fait de fantastiques affaires. D’autres se disent « si j’avais su ».
Au hit-parade de l’embellie, les Ferrari sont hors-concours. Il y a d’abord les merveilles, les quasi-uniques parce que construites à de rares exemplaires sur une base de carrosserie inhabituelle. Les coupés spéciaux Pininfarina, destinés aux dignitaires de ce monde, à des acteurs ou à des industriels, ne supportent pas les mêmes cotes que les simples Ferrari dites « de série ». Vignale, Abbott, Touring, Ghia ou Zagato ne sont pas que des noms et des coups de crayons. Ce sont des marques de fabrique, transformant le beau en sublime, le rare en introuvable. Ces Ferrari apparaissent et disparaissent comme par enchantement. Une main dans la salle, une voix au téléphone, un doigt sur le clavier d’un télex. De fausses enchères, destinées à chauffer les prix, en vraies acquisitions, il est difficile de suivre leur trace, Et Ferrari n’est pas le seul dans de cas. Qu’est devenue l’Alfa Romeo 8e-35 3,8 1 de 1935 (ex-Scuderia Ferrari), adjugée 14.500.000 F en mai 1988 chez Christie’s à Monaco?
Ou est passée cette incroyable Ferrari 250 GT de 1961 à empattement court, habillée par Pininfarina avec caisse alu, qui fut retirée de la vente de Versailles, en octobre dernier, parce que son propriétaire estimait que la dernière enchère à 14.800,000 F n’était pas suffisante? Celle-là, on risque de la revoir bientôt mais il semble que l’occasion d’un prix si élevé ne se reproduise pas de sitôt pour ce modèle.

Elles sont nombreuses, comme elles, à être parties sans laisser d’adresse. Serviront- elles de sombres desseins spéculatifs ou la passion exclusive d’un collectionneur un peu fou ?
En tous cas, j’ai bien regardé dans ma cave, soigneusement inspecté mon jardin. Aucune de ces voitures n’habite chez moi...

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